Simonetta Vespucci, Bonus !

Pour comprendre Simonetta Vespucci au-delà du mythe. 4 analyses exclusives (réservées aux abonnés Premium) : la fabrique de l'icône par les poètes, son rôle scénique chez les Médicis, le débat sur l'affèterie et l'impossible catalogue raisonné.

Sando Botticelli. Simonetta Vespucci

Suite de l'article : Simonetta Vespucci, miroir de la Renaissance.

En 4 compléments exclusifs

  • Simonetta Vespucci, beauté et affèterie
  • Simonetta Vespucci, comment les poètes de la Renaissance ont forgé une icône
  • Simonetta Vespucci et scénographie chez les Médicis
  • Simonetta Vespucci, l'impossible catalogue raisonné

Simonetta Vespucci, beauté et affèterie

Sandro Botticelli. Le Printemps. Détail. Les 3 grâces seraient inspirées de Simonetta Vespucci.
Sandro Botticelli. Le Printemps. Détail. Les 3 grâces seraient inspirées de Simonetta Vespucci.

Les courtisanes vénitiennes du Cinquecento portaient un maquillage sophistiqué, coûteux, élaboré avec des produits rares. Les patriciennes, elles, se devaient de paraître naturelles. Trop de fard signalait la professionnelle. Aujourd'hui, les codes se sont inversés. Les femmes riches assument des maquillages complexes, des interventions chirurgicales visibles, un entretien corporel qui ne se cache plus. Le naturel est devenu marque de classe inférieure.

Cette inversion révèle quelque chose sur la distinction sociale. Pierre Bourdieu l'a montré : ce qui sépare les classes n'est jamais stable. Les marqueurs de l'élite changent dès qu'ils sont adoptés par les classes inférieures. Au XIXe siècle, le bronzage trahissait le travailleur agricole. La pâleur signalait l'oisiveté bourgeoise. Au XXe siècle, le bronzage devient luxe. Il suppose des vacances au soleil, donc du temps et de l'argent. Les ouvriers d'usine restent pâles. La distinction s'est inversée.

On retrouve cette mécanique dans l'abondance visuelle de la Renaissance. Les retables regorgent d'or, de lapis-lazuli, de détails minutieux. Les commanditaires veulent de la richesse affichée. Plus il y a de dorures, de personnages, d'ornements, mieux c'est. Cette profusion peut sembler vulgaire. Elle l'est, au sens étymologique : elle s'adresse au vulgus, au peuple, qui doit être impressionné par tant de magnificence. Le jugement de goût qui y verrait de la vulgarité est un jugement de classe. Il suppose une position d'où l'on peut dire : « C'est excessif, c'est trop. »

Cette position existe déjà à la Renaissance. Érasme, dans son traité de civilité, condamne l'ostentation. Il prône la mesure, la retenue, la discrétion. Son discours s'adresse aux élites humanistes qui se distinguent de la bourgeoisie marchande enrichie. Dire « c'est vulgaire » ne décrit pas l'objet. Cela situe celui qui parle. Cela signale : « Je n'ai pas besoin d'afficher ma richesse pour qu'on sache que j'en ai. » C'est la stratégie du luxe discret, celle qui suppose qu'on partage déjà les codes avec son milieu.