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Peter Hujar , portraits de l’underground new-yorkais

Peter Hujar est un photographe américain emblématique des années underground new-yorkaises des années 70/80 Il réalisait des portraits saisissants du temps

Peter Hujar , portraits de l’underground new-yorkais

Peter Hujar, “Portrait In Life And Death”

« Mon travail est dans le droit fil de ma vie. Les gens que je photographie ne m’apparaissent ni comme des monstres, ni comme des curiosités. J’aime les gens qui osent. » Peter Hujar

Sommaire :

Peter Hujar (1934/1987, né à Trenton dans le New Jersey, États-Unis) est un photographe majeur des années 1970/80, très associé au New York « underground » de l’époque, dont l’East Village où il demeurait parmi les jeunes artistes. Son travail oscille entre commandes commerciales, reportages personnels et portraits rigoureux de célébrités des avant-gardes, d’anonymes, d’amis ou d’animaux qu’il ne distingue pas du point de vue de sa démarche de portraitiste. Il était également parfois « street photographer ». Le travail de Peter Hujar est donc assez éclectique, très marqué par l’ambiance new-yorkaise des marges et les prémices du mouvement pour les droits des homosexuels.

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Le corpus de Peter Hujar peut donc laisser quelque peu circonspect si on tient à en faire une oeuvre homogène. En effet, on attend de la photographie, dite « artistique » qu’elle soit, ou un témoignage emphatique notamment des marges, ou qu’elle soit esthétisante. Qu’il s’agisse d’images composées à l’extrême, quitte à être décadré et à effets (Voir La Nouvelle Vision et La Nouvelle Objectivité) ou tout au contraire expressionnistes, émotionnelles, granuleuses, purement subjectives (Nan Goldin, Francesca Woodman), la photographie « artistique » se situe donc dans la majorité des cas entre ces deux paradigmes, (pour en savoir plus voir notre article sur la photographie plasticienne).

Frontalité et distance photographique

Deux des contemporains du photographe newyorkais répondent à chacun de ces deux versants de la photographie « artistique », qui était encore loin d’avoir trouvée sa légitimité dans le monde de l’art, si ce n’est comme moyen de notation, en particulier, dans le cadre de l’art conceptuel et Fluxus, (voir nos articles sur Elina Brotherus et Ana Mendieta).

Robert Mapplethorpe (plus jeune que Peter Hujar d’une douzaine d’années) relève ainsi d’un certain classicisme formel, précieux, au contenu souvent volontairement scandaleux dans son cas de figure. Mapplethorpe était ambitieux et recherchait avec acharnement la reconnaissance, allant jusqu’à prétendre éclipser Andy Warhol. En ceci il se distingue diamétralement de Peter Hujar qui a renoncé dès les années 1970 à sa carrière de photographe publicitaire.

Diane Arbus (1923/1971), qui participa à l’apprentissage photographique de Peter Hujar, répond avec singularité aux critères d’une photographie de témoignage qui n’est pas pour autant un documentaire. Le regard de Diane Arbus témoigne avant tout de la photographe elle -même, de ses névroses, de son goût indéniable pour le « bizarre ». Le regard de témoignage rend compte d’une fascination sans véritablement décrire.

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Ces deux personnalités qu’il a croisées, admirées (Diane Arbus) ou rejetées (Mapplethorpe), sont aux deux extrémités entres lesquelles Peter Hujar se tient. L’univers mental du photographe est très différent bien qu’on y décèle aisément l’influence des uns ou des autres. Certains portraits grimaçants sont proches de Diane Arbus, la représentation de la sexualité croise parfois étrangement son cadet Robert Mapplethorpe. Mais ce qui domine chez lui, c’est avant tout le dépouillement sans formalisme et l’empathie contrôlée avec le modèle. La rigueur, l’engagement personnel et la distance fondent la ligne de conduite photographique de Peter Hujar. Il refuse de faire de « l’art » au dépend de son sujet, de l’écraser dans une recherche esthétique purement idiosyncrasique.